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FAMILLE CONVERT

L’arbre généalogique de la famille remonte jusqu’en 1626.

D’après les historiographes, le nom de " CONVERT " serait dérivé de " Conversus " (qui signifie converti) ; d’après les recherches elle serait une des plus anciennement convertie au christianisme.

Elle exerça le plus souvent la profession de meunier.

C’était une famille très nombreuse. Lorsqu’il y avait plusieurs fils, l’aîné restait sur le moulin paternel et les autres partaient plus loin en créer un autre. Il existe une carte montrant que les moulins de la famille couvraient toute la région.

C’est en 1840 que les CONVERT s’installent à PONT D’AIN

A partir de 1848, le moulin prit une très grande extension. L’arrivée du Second Empire stimula beaucoup les progrès industriels et l’apparition des Chemins de Fer facilita les transports. La minoterie s’agrandit des Moulins de Bellegarde (Ain) et Genève (Suisse) vers 1870.

A plusieurs générations, les CONVERT furent maires de Pont d’Ain.

Le décès de Jo CONVERT (frère de Marie-Madeleine, Simone, Marie-Thérèse et Paule), engagé volontaire en 1944, et tué en Alsace à Giromagny, le 21 novembre 1944, à l’âge de 21 ans, mit fin à la présence des CONVERT à la Minoterie de Pont d’Ain qui n’existe plus.

Paule Delomier

St Etienne – Le 12.01.1989


Une famille de meuniers : les Convert

 Il était courant jadis de transmettre le savoir-faire de génération en génération, particulièrement dans la meunerie. Ainsi en fut-il pour les Convert.

Etienne Convert, marié à Clauda Gallet, devient propriétaire le 12 octobre 1697 du moulin de Chaffoux à St-Etienne-du-Bois, berceau de la famille. De leur union descendent plusieurs lignées de meuniers installés en divers lieux du département (Bény, Bourg-en-Bresse, Verjon, Villemotier…),   

  D’abord modestes meuniers et propriétaires terriens, les Convert ont développé leur activité de meunerie jusqu’à posséder à la fin du XIXe siècle les minoteries les plus importantes du département : Pont d’Ain, Vonnas, Bellegarde-sur-Valserine, Bourg-en-Bresse. Aujourd’hui, la famille a cessé toute activité dans ce domaine.

 Le moulin de Chaffoux, arrêté en 1992, demeure toujours propriété des Convert.

[Publié par Le Patrimoine Rhonalpin, 5 Place de la Baleine 69005 - Lyon - Tél. 04.72.41.94.47 ]  


HISTORIQUE DES MOULINS DE PONT D'AIN - LE 1er JANVIER 1911 

PAR L'OCTOGÉNAIRE  BUSSILLET 

SERVITEUR DE LA MAISON CONVERT DE 1847 à 1867 

(TEXTE FOURNI PAR MICHEL MOUSSARD)

     Si l'on se reporte en 1750, on comptait trois Moulins sur les communes de PONT d'AIN et de NEUVILLE/AIN. Celui de FROMENTE, celui de CHATEAU-VIEUX et celui d' OUSSIAT. Ce dernier, un peu en aval de celui de Mr. Auguste CONVERT, fils de Mr. JEANDENIS, contenait trois paires de meules, maison d'habitation, écurie et tous les accessoires nécessaires au métier. Il était de bien loin le mieux achalandé du pays et appartenait â Mr. de GRELLIER, seigneur de PONT d'AIN. On le disait très ancien. 

    L'Ain, â cette époque, précipitait ses eaux en torrent depuis PONCIN, tel qu'il nous en reste encore une faible image de nos jours. Son lit était hérissé et encombré par des roches isolées que l'on fit disparaître, soit pour faciliter le transport des bois, soit pour d'autres causes nécessitées pour la construction du Pont de Neuville, et l'on fit beaucoup élargir son cours pour l'extraction de ces blocs. En son élan primitif d'alors, la rivière sur sa rive droite venait buter une suite de rochers qui s'avançait fort avant dans son Lit et rejetait son cours du côté de BUGEY. C'est sur ces enrochements que le Pont de Neuville a été bâtit de 1770 â 1777, lorsqu'on fut parvenu â les tailler et à les niveler à fleur d'eau. Le Pont achevé et la rivière barrée du côté du Bugey par la route qui fait suite au pont, il est bien certain qu'une grande transformation eut lieu dans le cours de l'Ain en aval de NEUVILLE. Ce que l'on sait par tradition, c'est que depuis un temps immémorial la rivière baignait les pieds des hauteurs de THOL el d' OUSSIAT et venait en tournant vers les GARENNES, suivre les murs du vieux PONT d'AIN avec des eaux  profondes. Vers cette époque, par suite d'une violente inondation, les MOULINS d'OUSSIAT furent emportés et l'on ne retrouva pas trace ni du Moulin, ni des bâtiments qui l'adjoignaient. Cependant, le Meunier et sa famille eurent le temps de se sauver. 

    Le Pont de NEUVILLE achevé, les Moulins d'OUSSIAT emportés, ceux de PONT d'AIN furent construits par M. de GROLLIER dans l'endroit où ils existent actuellement, puis concédés au Sieur AUSCHER, un des Entrepreneurs du Pont de Neuville, lequel AUSCHER les avait fait bâtir sous la haute direction de l'ingénieur AUBRI. AUBRI et AUSCHER, pour la dite construction des Moulins, avaient fait descendre de Neuville par bateaux, de grandes quanti tés de pierres de tous genres et matériaux divers. C'est avec ces pierres et matériaux, débris du pont, que furent fondés les Moulins et les premiers endiguements de la rivière. Ces dits Moulins possédaient trois paires de meules. Une pour moudre le froment, une pour les seigles, orges, sarrasins ou blé noir, et la troisième pour les mars passés au four, appelés gaude dont on faisait dans le pays une nourriture journalière pour les déjeuners et les soupers.

         Le constructeur AUSCHER ne garda pas longtemps les Moulins, ils furent revendus à un nommé VUARIX, puis au sieur GABIN, lyonnais d'origine, qui à son tour les revendit au sieur MOREL, Meunier à CISE au dessus de PONCIN, qui en partage furent légués à un de ses fils. On rapporte un mot typique de ce MOREL qui pratique à cette époque et bien avant le vieux métier de Meunier. En faisant sa tournée de patron, il disait à son garçon meunier: " Claude, t'es-tu payé ? - Oui patron As-tu pris pour moi en plus ? - oui patron - Aussi pour toi et pour l'âne ? - Oui patron Alors répétait-il en se retournant.. .Moi aussi !... De cette façon, il avait pris huit fois la mesure ordinaire du paiement, et la part du client devait être fortement endommagée. Il est vrai que la position de nos Meuniers à cette époque était à PONT d'AIN très onéreuse et très pénible par suite des inondations qui sans cesse causaient des détériorations aux barrages et occasionnaient de nombreux jours de chômage. Enfin on était arrivé à la terrible année de 1840 qui bouleversa totalement l'ancien endiguement qui amenait les eaux aux Moulins de PONT d'AIN et projeta une masse d'alluvions contre les murs de la ville, ce qui permit aux riverains de se créer des jardins que l'on voit encore actuellement depuis la place de l'église jusqu'à la Mairie actuelle. Le canal de la moitié moins large fut en partie comblé. 

    C'est dans cet état de chose que la Maison CONVERT fit l'acquisition des dits Moulins au sieur MOREL. Le Père CONVERT d'alors tenait une ferme à BENY en BRESSE. il était Bressan d'origine, mais son père était originaire de LONS-le-SAUNIER. Par héritage il possédait les Moulins de Crève-Coeur à BOURG. Le dit Père CONVERT avait six garçons, tous de beaux et solides gaillards, plus une fille : Mrs. : JEAN-MARIE, JEAN-DENIS, PAUL, JOSEPH, VICTOR, BENOÎT et la demoiselle qui devint plus tard Madame BON. C'est dans les Moulins de CREVE-COEUR que Mr. JEAN-MARIE fit son apprentissage de minotier et de commerçant. Il faisait moudre et allait revendre ses farines en BUGEY avec deux chevaux et deux chariots. La vente se faisait au comptant et il en rapportait un assez joli bénéfice. Le commerce des farines tel qu'il se pratique de nos jours était alors inconnu. Chaque boulanger achetait ses blés et les faisait moudre brut, puis les tamisait en pétrin, car peu de Moulins étaient pourvus de bluterie, si ce n'est quelques uns qui avaient des bluteaux, sorte de tamis bien primitifs alors, pour séparer les sons. On était à l'époque où la meunerie allait avoir une grande transformation et beaucoup d'améliorations par un nouveau système dit " à l'anglaise ". Dans le pays on parlait déjà de la Maison des frères TRANCY à GRAY/SAÔNE qui fut la première en France à adopter ce dit système. Mr. Jean-Marie alla les visiter et en fut émerveillé. Il alla trouver invinciblement M. HULLER, mécanicien à DIJON, qui était un des promoteur et constructeur du nouveau système et qui venait d'achever les Moulins de GRAY. Après arrangement, M. HULLER vint à PONT d'AIN prendre des mesures et toutes dispositions. 

    Les frères CONVERT n'avaient qu'une instruction fort succincte, mais qui chez eux était remplacée par un esprit positif, sans ambition personnelle ni ostentation aventureuse et surtout tous avaient une grande confiance en Dieu avec une piété sincère. Il faut omettre pour l'instruction M. Paul qui avait fait ses études pour être prêtre et devint curé d'AMBUTRIX en BUGEY, d'où il venait tous les jeudis à PONT d'AIN apporter ses vues et ses conseils . Sitôt l'usine achevée vinrent l'habiter : Le Père CONVERT, fort âgé alors et qui mourut à PONT d'AIN; il était veuf, mais je n'ai jamais rien su de la Mère qui certainement était morte à BENY depuis plusieurs années. Suivirent le Père : M. JEAN-MARIE et M. JOSEPH qui furent les promoteurs, organisateurs et les créateurs de l'usine qui allait prendre sous leurs ordres un si grand développement par la suite, soit industriellement, soit commercialement. Vint aussi M. Benoît qui trouva le moyen de devenir millionnaire en vivant  bien et sans grands soucis si ce n'est pour ses ébats, laissant à ses frères la charge des affaires, mais n' y mettant aucune opposition. Vint aussi leur unique soeur qui prit la charge du ménage. Pour M. JEAN-DENIS, déjà marié à l'époque, il resta à la ferme et M. VICTOR au Moulin de CREVE-COEUR. Mrs. JEAN-MARIE et JOSEPH avaient rude besogne. Il fallait à nouveau ouvrir le canal plus ou moins encombré par les grandes crues de 1840; refaire pour ainsi dire la grande écluse, la consolider et en boucher les brèches et solidifier les barrages de toutes parts. Pour bien peindre la situation, nous devons dire que sans sa traversée de PONT d'AIN, la rivière à cette époque formait trois îles dont il nous reste encore des traces. L' Île dite d'en haut formée par un embranchement de l'AIN qui s'engouffrait au sortir d'OUSSIAT vers les hauteurs des GARENNES et de là allait baigner les murs du vieux PONT d'AIN, et dont l'autre branche la séparait du territoire dit des BOTTIERES, ce qui en reste porte encore le nom de "terre de l' île" En dessous de l'écluse existait une seconde île dite du "château". qui con jointait celle qui reste encore entre l' OISELON et la rivière; mais la rivière à cette époque remplissait son lit actuel et coulait où est actuellement le jardin et la cour du Moulin. La 3 ème était celle du Port. C'est l'embranchement de la 1 ère  ci-avant qui faisait tourner les moulins. Ce dit embranchement avait été au temps jadis la principale branche de la rivière; mais déjà au moment de la construction de l'usine elle avait perdu beaucoup de son volume. Aussi avait-on commencé la grande écluse pour avoir toute la force de l'AIN dans les basses eaux, mais sa solidité était loin d'être suffisante dans les inondations torrentueuses qui faisaient brèche constamment dans ce travail plutôt provisoire que permanent. 

    M. de GRELLIER étant mort et l'État s'étant emparé de l'Administration des Rivières, on fut obligé de recourir à la Préfecture pour obtenir l'autorisation de reconstruire l'écluse en bonne forme de solidité, telle qu'on la voit de nos jours. Dieu sait ce qu'il a fallu de calcul et de travail opiniâtre pour vaincre, et quelle quantité de blocs de pierre est sortie de la carrière de la Tabatière, pour amener l'écluse à son état actuel. On fit nettoyer le Canal en l'élargissant de plus de la moitié et pendant qu'on cherchait à y amener la force d'eau, M. JOSEPH s'occupait à faire au mieux tournoyer les trois paires de meules des moulins primitifs, tout en faisant élever leurs murs de deux étages. Tout était assez en état, quoique les travaux nécessités pour le placement du mécanisme de M. HULLER ne fussent pas terminés, ma i s bientôt on vit tourner les six paires de meules nouvelles, dont quatre sur blé, une pour la remouture des gruaux, et une pour celle des sons. Quant aux anciens moulins ils continuaient la mouture pour la culture. Tous ces dits travaux avalent été exécutés sans architectes ni ingénieurs. Pour alimenter de grains la nouvelle usine, on achetait sur les marchés de BOURG et de LAGNIEU, mais ces deux marchés ne suffisant pas, on acheta au commerce des blés de Bourgogne à CHALON, que l'on faisait descendre par la SAÔNE à MACON,  d'où trois chevaux en faisaient le charroi à la Maison de CREVECOEUR et de là à PONT d'AIN, puis retournaient chargés d' issues. A PONT d'AIN sept chevaux étaient occupés au transports des farines en BUGEY, à LYON et dans les environs. Il est beau de lire ces détails et l'on croit voir marcher les choses comme par enchantement. On méconnaît et on oublie les ennuis, inquiétudes et vicissitudes de toutes sortes qu'elles ont causés avant d'être amenés à bien. 

        La bourse non plus n'était pas inépuisable. Les Banques de LYON étaient à 50 Kms. Il fallait trimbaler son pauvre corps en patache ou en diligence, principalement la nuit. hiver comme été, avec des rouleaux d'écus et de pièces de 1 et 2 francs . L'or alors était loin d'être abondant ainsi que les billets de banque, puis il fallait acheter au comptant. Le commerce des farines qui commençait son règne était assez lucratif, mais l'achat et la transformation de l'usine avaient coûté beaucoup. C'est en cet état de choses que La Maison trouva à emprunter 30.000 FS. à fonds perdus à un nommé COSANDIERE de LYON. Ce fut un grand secours vu que leur soeur allait épouser un sieur BON, de BOURG, et qu'il fallait pourvoir à sa dot. On était arrivé en 1844. On songea alors à marier M. JOSEPH qui épousa une demoiselle GEORGE, de MEXIMIEUX, et aussi M. VICTOR qui épousa une demoiselle BOUVIER, de MEILLONNAS. Deux riches coeurs et deux riches caractères pour la Maison et dont les dots remplacèrent celle de Mme BON. Pour donner une idée de la profondeur des eaux de la rivière alors qu'elles baignaient les murs du vieux PONT d'AIN, nous devons citer les deux faits suivants : A la fin du XVIII ème siècle, la tour qui portait le clocher s'étant écroulée par suite d'une inondation, les deux cloches, dont l'une était un gros bourdon, tombèrent dans Le gouffre et l'on ne put les retrouver, ainsi que les beffrois, en bois de chêne ferré. L'on n'en revit pas trace, malgré les recherches faites à cette époque. De même, les murs de la maison et de l'usine qui bordent la route sont fondés sur rocher. De même ceux du côté de la rivière sont également fondés sur rocher, et dans le temps ils dominaient de leur hauteur le cours de la rivière, maintenant ils dominent une vaste cour. Mais à la place de cette dite cour il existait un gouffre d'eau de 25 à 27 pieds de profondeur, soit de 7 à 8 mts. Les frères CONVERT entreprirent de faire combler ce fameux gouffre, la rivière s'étant élargie aux dépens de l' île du Château. Tout le pays cria à l'impossible, mais M. JEAN-MARIE ne se laissa pas intimider néanmoins on mit près de deux ans, et l' écurie des chevaux et les bâtiments  qui recouvrent la remise datent de 1847... 

    En 1846 la mauvaise récolte faisait prévoir une grande disette. M. JEAN-MARIE descendit à MARSEILLE et fit des achats considérables de blé avant que le bruit d'alarme fut jeté. Pour rendre ces blés à l'usine on les faisait monter à LYON par les bateaux de La Cie BORNADEL qui fonctionnaient depuis peu de temps à la vapeur puis de LYON à PONT d'AIN par voiturage. Tous les propriétaires de la Côtière qui avaient des chevaux en faisaient les charrois, vu la mauvaise saison. 1846 se passa assez bien, il y avait encore de vieux blés en greniers, mais 1847 fut terrible. Les pauvres de PONT d'AIN furent heureux d'avoir une Maison CONCERT. Vu la cherté de la vie, l'État et Les Communes firent ouvrir des travaux un peu partout. A PONT d'AIN on fit baisser la route au lieu dit "Monterre", à OUSSIAT, où existait une montée très raide. . . Revenons à 1847. En cette année, la Maison faisait la vente des farines et sons au détail. Elle fit publier et afficher que les ouvriers de la commune, employés aux travaux de Monterre, ne paieraient que le prix des années ordinaires les farines et issues, ainsi que tous les pauvres de la commune. Pour avoir une idée de ce bienfait il faut rappeler que le sac de farine de 125 K. se payait de 36 à 40 F. dans les années ordinaires et qu'il était monté de 95 à 100 F. en cette triste année de disette. Celte charité se faisait par l'entremise de Mme JOSEPH. Hélas, cela ne suffisait pas à son grand et noble coeur : elle pria son père de lui envoyer une somme assez conséquente pour satisfaire à la charité. Le pain c'est le principal, mais combien de choses sont nécessaires avec. . . . pour les malades, l'enfance, la vieillesse et constamment elle était harcelée par des quémandeurs de la pauvreté. M. JEAN-MARIE s'en étant aperçu la gronda amicalement un jour à table, lui disant que la maison était en état de satisfaire à sa charité. - " Oui dit-elle en pleurant, mais je ne peux pas cependant toujours donner le bien de tous. " "Le bien de tous répliqua M. JEAN-MARIE en homme de bon sens et de bon coeur, le Bon Dieu le rendra à tous, c'est bien assez que vous soyez la servante de tous... !" Quelques temps après, le bon papa GEORGES vint voir sa fille et ses petits enfants. Étant à dîner, M. JEAN-MARIE lui demanda si Madame JOSEPH lui avait rendu son argent des pauvres. Cette question était accompagnée d'un large rire d'amabilité. "oh reprit Mme JOSEPH, le Bon Dieu s'en est chargé, il m'a déjà envoyé un bon acompte. Il " Alors, je voudrais bien voir la couleur de sa monnaie dit M. JEAN-MARIE toujours en riant. Il "Cher Beau-Frère, voyez donc, répartit-elle en se sauvant et en montrant ses deux enfants qui étaient alors: M. PHILIPPE qui trotillait déjà et M. JEAN-MARIE qu'elle allaitait encore, et qui, assis sur sa chaise haute ronflait comme un bienheureux. Inutile de vous dépeindre notre gaieté. Aussi cette réponse ne tomba pas au feu. Elle fit le tour du pays et longtemps l'on parla de la monnaie du Bon Dieu.

     A partir de cette époque, la Maison prit un grand développement commercial. Vint 1848 la bonne récolte en tout fit disparaître les traces de la misère de 1847. Les affaires politiques n'arrêtèrent ni les travaux, ni le commerce, ni la charité de la Maison pour les pauvres du pays malgré la jalousie de quelques bourgeois. . Les marchés de BOURG gagnèrent beaucoup par l'affluence des blés de sa riche contrée qui trouvaient un débouché facile et sûr à sa Grenette. Mais celui de LAGNEU périclitait. Voici ce qui s'était passé. La jalousie ayant semé des bruits d' accaparement contre la Maison, des mécontents s'étaient rassemblés et avaient formé le projet d'écharper M. JEAN-MARIE dans la halle aux grains. Arrivé à LAGNEU on s'empressa de l'avertir afin de lui faire retourner bride sur le champs. " ah diable! dit-il (c'était son juron habituel) je voudrais bien voir çà. M. JEAN-MARIE grand et fort gaillard était Bressan dans l'âme, vif et opiniâtre, "puis, dit-il dans son patois de Bresse, à ses domestiques qui l'accompagnaient, allons voir, s'il faut se colleter, on se collettera, s'il faut se battre, on se battra, on verra bien après "mon arme" : ils ne veulent pas me manger.. On le retint à l'hôtel, le Maire s'empressa de l'y venir trouver, mais ne l'ayant pas soutenu, il s'en revint et on quitta le marché. Six mois après, la Municipalité vint solliciter le retour sur son marché, mais la Maison refusa nettement. . . .

     Vers cette époque (1849), M. JEAN-MARIE fut piqué par la tarentule du conjungo et se maria avec une veuve déjà sur l'âge, de St-Etienne du Bois, et s'en fut habiter avec elle. Après quelques difficultés qui furent apaisées par M. PAUL, Curé d'AMBUTRIX, sa dot fut laissée à la maison et il se contenta des revenus. Comme tous les hommes qui dépensent beaucoup d'activité et de soucis et se mettent brusquement au repos, il mourut peu de temps après. Pour le remplacer, M. JEAN-DENIS avait quitté la ferme de BENY et était venu habiter PONT d'AIN avec sa famille qui se composait de sa femme, de deux demoiselles encore jeunettes : Melles VIRGINIE et CONSTANCE et de M. AUGUSTE encore enfant. M. JEAN-DENIS trouva la Maison en bonne voie de prospérité et la continua supérieurement sous tous les rapports. Par une amélioration depuis longtemps projetée on augmenta la force du mécanisme et la force d'eau. En 1847 on avait fabriqué 12.000 sacs de farine de 125 K., on arriva progressivement à 15.000, à 18.000, puis à 20 et 22.000. Puis vint l'Empire et les chemins de fer qui furent d'un grand secours par suite de la facilité des transports et des progrès industriels, commerciaux et financiers. Tout en faisant prévaloir les faits et gestes de Mrs. JEAN-MARIE et JEAN-DENIS dans la fondation et la marche de la Maison, il ne faut pas oublier M. JOSEPH, qui bien qu'ayant les soucis de la direction de l'usine et de son intérieur, était pour beaucoup par ses conseils dans  l'administration et les décisions de ses frères, soit fondamentalement, économiquement et commercialement. C'était un homme de bon jugement et de grande prévoyance. M. JEAN-DENIS et sa famille avaient vite su gagner les sympathies des habitants de PONT d'AIN. Aussi fut-il nommé membre du Conseil Municipal et Maire de PONT d'AI N à la mort de M. André LOZIER qui avait remplacé M. DECROSO en 1848. Et quand M. JEAN-DENIS tomba paralysé ce fut M. JOSEPH qui le remplaça comme Maire. Mme JOSEPH depuis son mariage s'occupait de l'intérieur de la maison et ce n'était pas une mince besogne. Il fallait prévoir et pourvoir à la nourriture d'une vingtaine de personnes chaque jour, ainsi ,qu'à tous les à côtés d'un pareil ménage, et tout allait son train sans omettre la prière du soir qui se faisait régulièrement, tout le personnel réuni, sitôt après le souper. M. et Mme JOSEPH eurent neuf enfants, dont : M. JEAN-MARIE qui resta à la tête de la Maison, M. PAUL qui resta également dans l'administration sociale, M. JULES, 2 ème du nom, mis à la tête des moulins de BELLEGARDE et qui se retira à PARIS, M. JOSEPH qui est à la tête de l'usine actuelle de PONT d'AIN et Maire du pays, M. LOUIS qui administra les Moulins de Genève. Tous sont millionnaires et en bonne voie de famille. Pour M. JEAN-DENIS, il maria Melle VIRGINIE qui devint Mme ADAM, négociant en soieries puis Melle CONSTANCE qui devint Mme CAIRE, Avoué à NANTUA. Pour son fils AUGUSTE, il fit construire les moulins d' OUSSIAT, mais trop jeune et privé des conseils de prudence de son père, ainsi que de ses connaissances commerciales et industrielles il ne put se maintenir et finit par disparaître du pays et mourir jeune. Avant lui était mort son père, jeune encore, d'une attaque d' apoplexie. Il avait acquis pour la Maison l' Île du Château et avait vers 1856 fait un heureux marché à MARSEILLE qui consolida fortement la Maison. Pour M. VICTOR il se consolida dans les moulins de CREVE-COEUR et resta à BOURG ainsi que sa famille. Pour M. BENOÎT, devenu millionnaire sans le vouloir ni le savoir, il mourut à PONT d'AIN après avoir donné à l'Église pour sa reconstruction une somme assez élevée, fait don d'une cloche, et pourvu quelques bonnes oeuvres de charité. M. le Curé Paul CONVERT après avoir fait réparer son église d'AMBUTRIX et construire sa cure, se retira très âgé à PONT d'AIN, où il mourut. Ainsi disparurent les fondateurs de la Minoterie de PONT d'AIN, qui fut et continue à être une des gloires bienfaisante du pays sous la direction et l'exploitation des fils de M. JOSEPH, et qui est la mère et directrice des Moulins de BELLEGARDE et de GENÈVE, qui appartiennent à cette estimable et honorable famille qui est et restera une des célébrités commerciales de notre cher pays de PONT d'AIN. [M. BUSSILLET , SERVITEUR DE LA MAISON CONVERT DE I847 A I867 - TEXTE DE 1911. )